jeudi 17 février 2011

Le mystère de la taille de nos cuisines




Mark Bittman, qui a tenu la chronique The Minimalist dans le New York Times pendant plus de 13 ans, avait une très petite cuisine.  Dans un des articles qui a précédé son abandon de la chronique «the Minimalist, une discussion sur ce qui était nécessaire dans la cuisine a eu lieu.  Aucun gadget, peu de superflu, quelques casseroles, poêles, couteau.  Le minimum.

Les appartements à New York sont bien sûr minuscules, forçant les habitants à minimiser au maximum leurs appareils.  Ailleurs, la taille des cuisines est conditionnée par plusieurs éléments qui sont moins que sensés.  D’une part, pour avoir un grand logement, il faut souvent habiter en périphérie, ce qui demande du voyagement pour travailler et soustrait ainsi du temps nécessaire pour cuisiner.  D’autre part, si l’on habite dans des grandes villes un grand logement est souvent synonyme de travailler davantage.  Donc encore là… moins de temps pour utiliser cet espace "sacro saint". 

Mais on peut se demander quel est le rôle de la cuisine dans le statut social des habitants hors des grandes villes.  Les hommes s’y intéressent maintenant, est-ce que c’est la cause déterminante de l’augmentation de la taille de cet espace vital?  Peut-être la cuisine est l’endroit où nos aspirations sociales sont les plus manifestes.  Nous sommes de plus en plus seuls, et cette pièce est souvent l’endroit qui nous lie aux amis et à la famille.  C’est particulièrement évident dans cette mode des cuisines ouvertes sur le reste de la maison où la famille et les amis peuvent être intégrés dans cet espace.

Autrefois la cuisinière vivait l’essentiel de son temps à la maison avec les enfants.  Cette pièce était un endroit chaud.  Lorsque la mode des cuisines ouvertes sur la maison n’était pas encore en place, souvent, le confort des maisons et leur isolation en hiver laissait à désirer.  Cette pièce était donc chaude et agréable puisque l'espace à chauffer était limité. 

Nos maisons et nos désirs étant souvent modelés par une « appartenance » aux classes auxquelles nous aspirons, elles s’inspiraient des demeures où les domestiques faisaient la cuisine et où l’on ne souhait pas voir ces espèces peu recommandables être en contact avec les êtres supérieurs du séant.  Leurs tâches avilissantes devaient être cachées, loin des pièces nobles. 

Est-ce que c’est la télé qui a forcé un retour de l’intégration de la cuisine au reste de la maison?  Pour des raisons techniques, il devait être beaucoup plus simple de filmer une grande pièce que de petites pièces isolées.  Est-ce que c’est Le Corbusier,  qui insistait pour que l’on remplisse la maison d’air et de lumière?  Je ne sais pas.

Une chose est certaine, est que l’on en soit conscients ou non, cet endroit est le reflet de ce que nous sommes, de nos aspirations et de nos contradictions.

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